APPEL A LA MARCHE
21 AVRIL 2024
Contre le racisme, l’islamophobie et pour la protection de tous les enfants
BARBES – REPUBLIQUE 14H00
* Dress code Noir
RACISMES EN FRANCE : Nos enfants en danger ! Discours de clôture de Yessa Belkhodja lors de la « Marche contre les racismes, l’islamophobie et pour la protection des enfants », Paris le 21/04/2024 Dans l’appel à cette marche contre le racisme, l’islamophobie et pour la protection des enfants, Amal Bentounsi et moi-même faisions le constat suivant : « Le monde observe la dégringolade du « pays des droits de l’homme » avec stupéfaction. Ce pays que nous chérissons, la France, et que nous voulons laisser à nos enfants, nous trahit et trahit son passé. » Nous étions en deçà de la réalité. En effet, depuis le 7 octobre, une frénésie autoritaire s’est emparée du pouvoir. Outre les interdictions de manifester qui sont autant d’atteintes aux libertés publiques, de nombreuses personnalités sont ciblées et convoquées par la police antiterroriste. Parmi lesquelles Jean-Paul Delescaut, secrétaire générale de la CGT du Nord qui vient d’être condamné à 1 an de sursis, des étudiants de l’EHESS, Rima Hassan, candidate LFI eux européennes, Anasse Kazib, porte parole de Révolution Permanente, ou Sihame Assbague, journaliste. Cette situation est extrêmement grave et je n’ai pas peur ici de dire que nous basculons tous les jours dans un régime fascisant. Mais, il y a un grand MAIS. Je parle ici en tant que maman de quartiers, je parle ici en tant que « première concernée » par les violences d’Etat, je parle ici en tant qu’initiatrice du collectif de défense des jeunes du Mantois et j’attire l’attention de tous sur le silence qui a entouré un événement majeur, lourd de conséquences, dans les jours qui ont suivi le 7 octobre et qui brise les maigres principes qui soutiennent encore cette république agonisante : le fait que le 18 octobre 2023, au Canet-en-Roussillon, un enfant de 10 ans a été convoqué par la gendarmerie pour « apologie du terrorisme ». Je répète : un enfant de 10 ans a été convoqué pour apologie de terrorisme et ce dans l’indifférence générale. Cet enfant était un « musulman d’apparence » ou pour le dire dans des mots simples : un enfant arabe. Si la police de Macron a jugé qu’elle pouvait se permettre un tel excès, c’est que cette police sait qu’elle peut compter sur l’indifférence de la société, voire parfois sa complaisance. Si la police de Macron a jugé qu’elle pouvait voler l’innocence de cet enfant, c’est qu’elle sait que l’opinion donnera sont blanc seing. Aussi je pose une première question : 1/ pourquoi s’étonner que des adultes, des syndicalistes aguerris, des militants politiques ou associatifs connus et respectés tombent dans l’arbitraire de la répression de l’Etat quand même des enfants le sont ? 2/ Je pose une deuxième question : quand comprendra-t-on que l’Etat autoritaire qui s’abat aujourd’hui sur l’ensemble du mouvement social, des gilets jaunes jusqu’aux parlementaires de la FI démocratiquement élus, s’est fait les dents sur le corps social le plus vulnérable et le moins organisé, le plus pauvre et le moins défendu, le plus contrôlé et le moins légitime, à savoir l’immigration post-coloniale. 3/ Je pose enfin ma troisième question : quand comprendra-t-on que l’islamophobie est la pièce maitresse du dispositif répressif et autoritaire et que c’est à travers ce racisme spécifique que l’Etat a réussi à ramollir la conscience de gauche ? Quand comprendra-t-on que c’est à travers l’islamophobie et une laïcité instrumentalisée et détournée de sa fonction première qu’on persécute des jeunes femmes pour leurs tenues vestimentaires violant ainsi les libertés individuelles, qu’on ferme des écoles musulmanes et des mosquées violant la liberté de culte et de conscience, qu’on persécute et expulse des imams ou qu’on agite la menace antiterroriste à des fins racistes, antisociales ou pour museler toute contestation politique. Notre malheur collectif, c’est que nous avons désormais des esprits habitués. Habitués à supporter la misère sociale, le racisme, les flics et l’armée dans les rues, la militarisation du quotidien, la guerre partout. Mais il y a pire que le malheur collectif. C’est le déshonneur collectif. Depuis le 7 octobre, nous avons prouvé collectivement notre capacité à tolérer le massacre des enfants de Gaza. Ils sont aujourd’hui près de 15 000 à avoir été tués par l’armée israélienne. Ils sont peut-être le double sous les décombres. De cela, notre humanité ne sortira pas indemne. C’est parce que nous refusons ce déshonneur qu’Amal Bentounsi et moi-même avons initié cette marche contre le racisme, l’islamophobie et pour la protection des enfants. Parce que nous sommes mamans d’enfants arabes et musulmans susceptibles d’être convoqués pour apologie du terrorisme, Parce que nous avons vu nos enfants de Mantes-La-Jolie agenouillés par dizaines devant les caméras du monde entier, Parce que nous avons pleuré la mort prématurée de notre frère Amine Bentounsi, dont nous fêtons le triste anniversaire aujourd’hui, Parce que nous pleurons tous les morts qui ont précédé Amine et qui lui ont succédés du petit Nahel, mort à 17 ans en juin dernier à Wanys, mort en Mars dernier. Enfin, parce que nous sommes dévastées par le nettoyage ethnique à Gaza dont les enfants sont les premières victimes. Malgré tout, Amal Bentounsi et moi sommes fières de cette marche, fières d’avoir défié la préfecture qui s’est acharnée à l’interdire, fière de nous êtres battues avec nos alliés, le NPA, la FI, ATTAC pour la faire autoriser. Nous sommes fières d’avoir accompli notre devoir de mamans, de militantes, de citoyennes. Mais nous devons aller plus loin. Cette marche n’est qu’un jalon parmi d’autres. Demain, la répression reprendra de plus belle. Nous n’avons aucune solution miracle à proposer si ce n’est celle à moyen termes de soutenir tous les projets politiques qui défendent les intérêts des habitants des quartiers, des Noirs, des Musulmans, des migrants, qui sont solidaires des peuples du sud qui se battent pour leur liberté et leur dignité et qui se rangent fermement du côté des Palestiniens, c’est à dire des opprimés. Mais à très court terme, étant donné la répression qui s’abat sur toute voix solidaire de la Palestine au prétexte de l’antiterrorisme, et en solidarité avec ceux qui sont poursuivis, voici ce que nous disons à la police de ce pays : accusez-nous tous, convoquez-nous tous et poursuivez-nous tous. Nous sommes tous coupables d’avoir des convictions antiracistes et antiimpérialistes. Et si pour vous, la solidarité et la fraternité avec les peuples du monde constituent un crime alors réjouissez vous de nous voir nous livrer nous-mêmes par milliers à cette inquisition des consciences.
PROTECTION DES ENFANTS
Le 6/12/2018, 151 lycéens de Mantes-La-Jolie étaient violemment interpellés. Un policier filmait cette scène, d'une violence sourde, des enfants agenouillés, mains sur la tête, un jour de decembre 2018, moqués par des policiers célébrant "Un classe qui se tient sage". Ces images horribles avaient suscité, à juste titre, indignation et colère à travers le monde entier. Nous avions analysé cette image comme un symptôme et pas comme une "bavure", c’est-à-dire comme un moment de vérité pour cette république à bout de souffle, qui ne tient ses pauvres et ses descendants de colonisés que par la matraque, le Taser, le LBD et la prison.
RACISME
Une pancarte affiche "Hands for our kids, no cops in school" sur fond neutre. Le message clair et fort exprime un appel à la protection des enfants et à l'opposition à la présence policière dans les écoles, suscitant une réflexion sur la sécurité et l'environnement scolaire.
ISLAMOPHOBIE
Autour du musulman, de la femme voilée, se généralise un vaste système de discrimination qui autorise n’importe qui à se méfier, à exclure, à signaler, au mépris des dernières digues platement humanistes qui séparent le racisme ambiant de la barbarie, dont une seule image, photographie puis dessin (bientôt symbole ?) résume tout : une mère avec son enfant. L’enfant pleure l’humiliation de sa mère, dont un odieux politicien d’extrême droite vient d’exiger la disparition pour que la séance d’un conseil régional se tienne. Il pleure la honte de sa mère, sa propre honte, et gageons que demain il pleurera sa honte d’avoir eu honte. Non seulement ces larmes n’ont pas bousculé le monde politique – droites et gauches confondues -, mais elles semblent même avoir fait redoubler de virulence les tenants de l’ordre dominant dans son escalade islamophobe. Quand le visage meurtri d’un enfant n’arrête plus, mais au contraire stimule un imaginaire morbide, on sait qu’un seuil est franchi, et qu’on touche du doigt le réel brûlant de la guerre civile – le moment où le prochain, devenu étranger de l’intérieur, peut être atteint à n’importe quel prix.
“Chaque génération doit dans une relative opacité découvrir sa mission, la remplir ou la trahir.”
Frantz Fanon
A PROPOS DE NOUS
LA SOCIETE CIVILE S’ORGANISE :
Nous, familles, personnel enseignant, travailleurs sociaux, éducateurs, militants de terrain, hommes et femmes politiques sommes terrifiés de la violence qui s’abat sur nos petits en
toute bonne conscience et en l’absence d’indignation. Le monde observe la dégringolade du
« pays des droits de l’homme » avec stupéfaction. Ce pays que nous chérissons, la France,
et que nous voulons laisser à nos enfants, nous trahit et trahit son passé.